Minute 51 : grosse absurdité sur l'IA qui permettrait de gérer une classe de 25 comme une classe de 12. Faut vraiment jamais avoir parlé à un prof de sa vie pour dire un truc comme ça.
Très bonne chronique de Thibault Prévost pour Arrêt sur images, qui compile pas mal de publications récentes sur les IA génératives (merci pour le temps gagné) et pointe notamment les changements dans le fonctionnement du moteur de recherche de Google (bientôt dopé à l'IA, et "gérée comme un feed de réseau social"), le tout en restant aveugle aux "conséquences sur les rapports de pouvoir entre la Silicon Valley et la société civile."
Prevost revient sur les promesses toujours douteuses d'IA miraculeuses qui fonctionnent toutes seules (même quand il y a un call center derrière, ou un script bien agencé).
"L'IA n'est pas une course aux armements, c'est un concours de prestidigitateurs, face auquel le scepticisme par défaut devient la seule attitude saine."
Il fait en effet bon rappeler que le taux d'erreur de ChatGPT4 oscille entre 2,5 et 25 % : rien qui ne devrait pousser à faire des IA génératives les nouveaux portails de l'information. Ce sont selon le journaliste des "armes de désinformation massive".
Qu'on partage ou non la tonalité du papier, on conviendra que ces objets nous ont fait passer dans une nouvelle ère, où il devient difficile, sinon impossible de reproduire 2 résultats à l'identique dans une machine.
Comme l'écrit @hubertguillaud dans la newsletter " @danslesalgorithmes : "la grande difficulté consiste à savoir là où on peut leur faire confiance et là où on ne doit pas leur faire confiance."
En dehors de quelques niches, et au regard des milliards dépensés, on peut légitimement se demande où sont les bénéfices pour la société. A quels problèmes répondent ces IA au juste ?
"comme toute infrastructure l’IA pollue. Mais les raisons pour lesquelles elle nous inquiète sont plutôt à regarder du côté de sa croissance."
"Ce qui nous pose surtout question, c’est l’absence de débat démocratique pour se demander si ce choix technologique et la pollution associée en valent la chandelle quant aux enjeux climato-écologiques qu’on connait"
Ce n'est pas directement mon domaine d’expertise mais je ne peux qu’encourager à la lecture de « Chine / États-Unis, le capitalisme contre la mondialisation » de l’économiste Benjamin Bürbaumer (La Découverte). Un bouquin documenté qui revient sur les tensions entre les deux grandes puissances, avec un effort d’historicisation important et bienvenu pour éviter de céder à la tentation de l’analyse à chaud depuis des coupures de presse.
On saisit bien dans ce livre, la subtilité de deux projets qui s’affrontent dans leur volonté hégémonique, l’un ayant commencé avant l’autre via toute une série de de procédés connus ou non. En lien d’abord avec la structure même du capitalisme et la lutte pour la conservation du taux de profit à travers l’expansion territoriale, conformément à ce que David Harvey nomme les « solutions spatiales ». Puis le soft power d’Hollywood évidemment, en passant par l’arme monétaire du dollar,
le tout soutenu par une immense force militaire, et 750 bases installées à travers le monde, notamment sur des îles qui sont « des instruments de domination du monde. »
Autant de dépendances que la Chine tente de mettre à distance. Au « doux commerce » des USA, qui étendent une partie de leur capital (dit transnational) à l’ensemble de la planète, répond donc une tentative chinoise de produire un « nouveau type de relations internationales » moralement supérieur.
La Chine tente au demeurant de ne pas reproduire les erreurs des USA qui valent aujourd’hui toutes sortes d’inimitiés au pays. A tel point que pour certains pays périphériques, et comme le traduit bien l’ancien Secrétaire au Trésor Larry Summers : « La Chine nous donne un aéroport. L’Amérique nous donne une leçon de morale. »
C’est aussi la force du livre, faire valoir de façon froide l’envers du décor, un monde certes encore dominé par les USA mais en voie de fractionnement, ce qu’a constaté
avec surprise l'Occident, s’étonnant du peu de soutien de la communauté internationale à l’Ukraine, ou encore à Israël. Le double discours – souvent qualifié d’hypocrite – des pays du Nord, et particulièrement des USA (responsables de 3,7 millions de morts – directes (940 000) et indirectes – depuis 2001) n’y est pas pour rien, et produit de manière tragique un effritement de l’hégémonie américaine, à laquelle de moins en moins de pays consentent.
Nul naïveté cependant face à la proposition chinoise, qui reste juste une autre façon de gérer le capital. Comme conclut Romaric Godin dans un épilogue bien senti, le point de départ de la tension entre les deux puissances réside dans la lutte des classes et dans la répression du mouvement social : « L’enjeu n’est pas de choisir entre les prétendants à la gestion du désastre capitaliste, mais bien davantage de réamorcer cette lutte des classes et de le faire dans une dynamique non impérialiste »