Mais puisque l’on n’arrête pas de vous le répéter, la France se droitise, par Johann Chapoutot
C’est au nom du «pragmatisme», son marqueur supposé, que le «nouveau monde» de 2017 glisse sans fin vers la droite, car c’est bien la France, argue-t-on, qui se droitise. La preuve, CNews et BFM le disent, des chaînes branchées en permanence dans des cabinets ministériels, soucieux, par là, de «sentir» le pays. Peut-on sérieusement considérer une matinale bolloréenne comme un reflet du «pays réel», expression de Maurras reprise par Macron ? Un brin de sociologie révèle, avec Bourdieu, que «l’opinion publique n’existe pas» : les «sondages» n’explorent que les obsessions de leurs commanditaires qui inscrivent, en définissant les questions et les réponses, tel thème ou tel «débat» à l’agenda médiatique et politique.
Il existe bel et bien une «fabrique de l’opinion», comme le montrent les travaux de Patrick Champagne et de Loïc Blondiaux, les chaînes dites d’information en continu n’étant que les caisses de résonance de cette vox populi hâtivement construite. Grosses caisses, car le travail de journalisme (enquête, reportage, croisement des sources pour l’établissement scrupuleux des faits) y est liquidé au profit d’un plateau d’intervenants avariés – toutologues impénitents, éditorialistes immarcescibles (la séquence qui oppose Michaël Zemmour, un universitaire qui travaille et sait de quoi il parle, à FOG [Franz-Olivier Giesbert], est devenue iconique), personnalités sur le retour trop heureuses de bavasser avec l’animateur pour meubler du temps d’antenne et proposer une version cathodique du bistro, avec ses approximations péremptoires et son avachissement permanent – plateau qui ne coûte quasiment rien par rapport à un réel travail de presse.
Quand l’argent s’achète sa prophétie autoréalisatrice
Ce modèle économique a tout pour séduire le milliardaire propriétaire local, soucieux de répandre à moindres frais des idées, des mots et une grammaire politique propres à satisfaire ses objectifs – destruction de l’Etat-providence par la poursuite inconsidérée d’une politique fiscale et sociale inepte (Drahi, Saadé, à l’extrême centre), ou croisade culturelle et religieuse (Bolloré,extrême droite). L’argent s’achète ainsi sa prophétie autoréalisatrice : la France est de droite, puisqu’on ne cesse de vous le répéter.
Ce n’est pas vraiment ce que montrent d’autres enquêtes, comme celles menées par Libération depuis le premier confinement et, plus récemment, par les Echos, quotidien au bolchevisme très tempéré, ou les études qualitatives du Cevipof et de la Fondation Jean-Jaurès : des «valeurs» comme le partage, la solidarité et l’égalité apparaissent singulièrement plus populaires que la guerre darwinienne de «ceux qui ont réussi» (les héritiers, en gros) contre «ceux qui ne sont rien» et autres enfantillages macrono-lepénistes. Bizarrement, ce ne sont pas ces résultats-là qui font la une des médias d’extrême centre – droite, de plus en plus à l’unisson : d’une part, concurrence oblige, BFM se met dans la roue de CNews et, d’autre part, tout le XXe siècle en témoigne, le centre file toujours à droite, car l’ennemi est le même (le
communiste jadis, l’écoterroriste, le zadiste et le décroissant aujourd’hui) et la vision du monde (sociale darwinienne, productiviste, extractiviste, technosolutionniste –, bref, capitaliste à tous crins) est, dans l’essentiel, partagée.
Certes, il y a les questions sociétales, qui peuvent faire couiner les plus délicats des (extrême-) centristes (alias l’«aile gauche de la macronie», entité fantomatique), rebutés par les pulsions xénophobes, religieuses et plébéiennes (Hanouna) de l’extrême droite mais, en cas de second tour Le Pen-Mélenchon, le cœur balancera, et pas forcément à gauche. Les libéraux-autoritaires de 2017 (l’alliance Le Maire-Benalla) ont toujours été de droite, mais leur dérive vers l’extrême droite est, comme en témoignent le vote de la loi immigration et le pacte de non-agression Macron-Bolloré scellé à l’automne, plus rapide et plus inquiétante que ne le laissaient redouter des précédents historiques comme le virage à droite du Parti radical en 1938 (bien rappelé par Michaël Foessel dans son si intelligent Récidive) ou le hara-kiri deslibéraux-conservateurs allemands à l’automne 1932, qui ont installé les nazis au pouvoir.
Parmi eux, Alfred Hugenberg : ce financier, devenu magnat de l’industrie minière, était un passionné de médias et se mit à investir dans la presse, le cinéma et la radio, créant le type de l’industriel de l’information que les Berlusconi et Bolloré allaient ensuite incarner. Animé d’une foi pangermaniste et raciste missionnaire, il inonda la presse nationale et régionale, mais aussi les films et les actualités cinématographiques de cet ethnonationalisme que les nazis partageaient. Il en fut récompensé en étant nommé ministre de l’Economie du cabinet Hitler, le 30 janvier 1933 dont, cannibalisé, il démissionna six mois plus tard. Il dut alors céder son empire médiatique à ses encombrants amis et se résigna à couler, jusqu’en 1945, de douces années à faire ce que ses amis d’extrême-centre et lui faisaient au fond de mieux : de l’argent.
Juste un accent qui moque la caissière, qu’il savait qu’il faisait perdre son temps à la personne.
Mais bon, il faut surtout blâmer l’éducation, la jeunesse, plutôt que la personne.
Cependant je ne pense pas que cela va être la conclusion de tout le monde, et le fait d’écouter un média de droite va donner cette mauvaise conclusion. Car en soit, cela aurait pu être n’importe qui d’autre qui fait ce type d’action.
il faut surtout blâmer l’éducation, la jeunesse, plutôt que la personne.
Malheureusement, L’éducation c’est principalement le niveau de vie des parents. Ça impacte leur disponibilité physique et mentale, l’accès aux loisirs, les relations sociales, la qualité de l’école…
Hmm, du coup si bonne condition de travail, bon salaire, chance élevée d’avoir un enfant éduqué si je comprends bien.
Voir l’enfant comme une conséquence de la situation des parents, et considérer que l’état à sa part de responsabilité dans le problème si l’enfant se porte mal dans une grande partie des cas.
Il y a probablement des raisons légitimes pour chavirer à droite,
Ah, euh, oui, surement.
par exemple le fait de penser que le respect envers autrui se perd un peu avec des enfants souvent d’origine étrangère,
Oui, juste une exemple totalement au hasard, oui. Ça aurait pu être le fait que les 1 % s’engraissent alors que le niveau de pauvreté augmente, que les acquis sociaux sont détruit et n’assure plus aucune sécurité individuelle, que la mondialisation à outrance a détruit l’environnement, les territoires et le tissus social de quasiment tous les pays du monde, etc. mais oui, lénoirélézarabe, oui, oui…
ce qui peut-être vrai ou non je ne sais pas,
Oui, on sait pas…
Non, c’est vrai, c’est comme le fait que les 1 % s’engraissent alors que le niveau de pauvreté augmente, que les acquis sociaux sont détruit et n’assure plus aucune sécurité individuelle, etc.
Je ne sais pas, moi non plus… On ne sait décidément pas grand chose, hein…
mais j’ai eu l’observation hier même…
Oui donc on sait pas, mais on sait quand même là où on veut amener la discussion, quoi…
d’un jeune homme qui emmerde une caissière au lieu de simplement payer et partir en mettant ses courses au milieu d’un autre, doublant la file par la même occasion, et file une somme inférieure à celle demandée avec une voix bien délinquante.
« Voix bien délinquante », je ne connaissais pas cette expression pour dire « accent arabe ».
Vous êtes raciste, assumez.
Mais ducoup ton :
Il y a probablement des raisons légitimes pour chavirer à droite,
Tu peux te le mettre là ou je pense… Le racisme n’est pas légitime, il ne faut pas prendre les gens pour des cons et teinter son discours de bienveillance ou d’un ton juvénile pour penser que ça passe…
Merci pour la réponse. Cela donne une justification que je peux comprendre du coup.
Le problème à mes yeux est le fait qu’il y a un manque d’empathie de la part de cette personne. Si je devais parler avec colère par rapport à cette situation, ce serait quelque chose du style :
“Mais bon sang arrêtez avec vos jeux enfantins. Déjà de vouloir mettre ses produits devant ceux d’un autre, le but est de faire payer l’autre si la caissière était dupe et générer une dispute entre celui qui paie et la caissière ? De plus, rendre le travail de cette personne bien plus difficile de par cette situation n’est pas glorieux.”
La voix délinquante est juste le fait que je pense que si je dis ça je risque de me faire casser la gueule à la sortie du magasin, probablement la raison pour laquelle la caissière n’a pas non plus insistée quand la somme n’était pas correcte, ce qui est du vol en soit mais bon. Je ne pointe pas la personne en lui-même mais les actions. De par le fait que vu comment la situation s’est déroulée, le respect des règles n’est pas à cela prêt, donc cela me semble juste d’assumer l’ensemble comme “il est délinquant”.
Enfin, je vois juste un manque d’éducation dans tout cela, un manque d’empathie.
En second commentaire, je peux ajouter le fait que je pense tout de même que la droite à des racines dont il est possible de fournir des réponses. Après, cela revient juste à la simple question de comment réduire le racisme, les simplifications de la pensée de considérer les traits de l’ensemble comme les traits de l’individu.
Il faut éduquer, il faut de la mixité sociale dès le plus jeune âge, à l’école, est une réponse.
Je supprimerai le commentaire en fin de journée vu que cela semble amener beaucoup de bas-votes car sujet à conflit, et le fait observé n’est pas en soit une explication sur le pourquoi la société se droitise.
Edit : Suppression effectuée, merci pour ceux qui ont haut-votés mais, une opinion qui ne fait qu’alimenter la haine envers autrui, qui se résume au simple fait qu’une partie de la droite à des motivations racistes dans le vote de par du vécu. Puisque propagation de haine, même si ce n’était le but, mon message doit disparaître de la vue.
Supprimer les commentaires avec lesquels les gens ne sont pas d’accord est un symptôme de la droitisation de la société => autoritarisme et censure mdrr
C’est plus le fait que ça me plombe un peu le moral. Pas trop habituée à donner des opinions qui amène par défaut un conflit d’opinion.
Enfin, je relativise. C’est pas des flèches vers le bas qui doivent plomber le moral de ma personne, mais, première fois que ça m’arrrive donc ça m’attriste quand même un peu.
Tu peux lâcher des commentaires qui sont nettement moins de l’opinion comme une blague sérieuse que j’avais fait sur un montage de présidents américains récents (vu l’élection approchant là-bas c’est le cirque et y a du contenu qui touche le fond) : « je ne vois que des criminels de guerre sur cette image ». Si c’est controversé il y aura des bas-votes, même si c’est difficile ou impossible à nier. Alors de l’opinion…
Oui, j’essaierai à l’avenir de rester dans des faits à une échelle plus globale plutôt qu’un simple moment de la journée.
Je cherche généralement à mettre des commentaires ou de faire des posts pour donner un peu de vie à la communauté, mais, on peut se passer de résultats négatifs comme ce sujet ci-présent. Si ça fache pour des raisons valables, alors ça doit disparaître de la vue, que je peux dire.
C’est plus le fait que ça me plombe un peu le moral.
Sérieusement, tu ressorts du CNEWS 1:1, encore heureux que ça ne passe pas…
Relis ton commentaire, il y a un vrai problème dans ce qu’il mets en avant. La France se droitise et le relativisme dont tu fais preuve en est la parfaite illustration.
Il y a des problèmes dans la société, mais c’est pas les gens que tu vises qui en sont responsable.
Oui, je viens du coup d’ajouter le fait que la délinquence est une conséquence de l’état de la société, plutôt qu’une source d’un problème de la société au niveau de ma pensée.
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